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Photo du rédacteurMichel Havez

Apollo - Soyouz, symbole de la détente Russo-Américaine.

Dernière mise à jour : 19 août 2023

Après la course à l'espace de l'époque Apollo qui opposait les deux super puissances mondiales, les relations entre les USA et l'URSS se détendent enfin.

Après avoir frôlé la catastrophe avec Apollo 13, la poursuite du programme Apollo a du plomb dans l'aile. Seuls les vols 14 à 17 se réaliseront, les missions 18 & 19 seront abandonnées.

On est au début des années 70, les budgets de la NASA ont fondu comme neige au soleil, alors comment utiliser les fusées et les capsules déjà fabriquées mais désormais sans programme ?



En 72, les présidents Léonid Brejnev et Richard Nixon cherchent à médiatiser la détente. Ils se rencontrent à Moscou et signent pour une mission spatiale conjointe, complètement inutile mais hautement symbolique. Jugez plutôt : il s'agit, ni plus, ni moins, d'une poignée de main historique entre astronautes Américains et cosmonautes Soviétiques, en orbite, chacun ayant décollé de sa patrie à bord de son son propre vaisseau. A cette époque, c'est incroyable, tant sur le plan technique que politique. Surtout politique.


Sur le papier, ça parait assez simple. On sait aller sur la lune, donc un petit rendez-vous orbital ne devrait être qu'une promenade de santé... Mais réussir un accostage, puis un amarrage, un équilibrage des pressions et enfin un transfert de personnels, avec 2 technologies qui n'ont rien en commun, qui ont évolué chacune de leur côté, cachant jalousement la moindre facette de technologie pour ne pas en faire profiter l'autre, reste une gageure.


Seuls les vaisseaux Apollo 🇺🇸 et Soyouz 🇷🇺 sont susceptibles de mener cette mission à bien, mais dans les détails, beaucoup de choses sont incompatibles. Chacun des 2 vaisseaux est muni d'un port d'amarrage mâle, qui vient s'emboiter sur un port d'amarrage femelle. Le module lunaire Apollo vient emboiter son port mâle dans le port femelle du LEM. Idem pour le système Soyouz. Il faudrait donc que l'un des deux vaisseaux modifie sont port d'amarrage mâle en port femelle. Mais là, c'est le drame ! Vous la voyez arriver la douille ?

Oui, on en est là : malgré la belle détente apparente, aucune des deux nations ne veut se résoudre à avoir le vaisseau femelle...


Après de longues semaines d'intenses discutions, il est décidé de mettre au point un port d'amarrage androgyne : l'APAS (Androgyne Peripheral Attach System).

Le système APAS

Au moment de l'amarrage, il y a obligatoirement un côté qui joue un rôle actif et l'autre un rôle passif, mais les deux côtés ont la possibilité d'être soit actif soit passif. Ainsi, il ne sera jamais évoqué le terme mâle ou femelle, ménageant les susceptibilités ou les égos de chacun.


Cette écueil résolu, d'autres problèmes subsistent, notamment celui des pressions, mais surtout celui des atmosphères, qui sont incompatibles. Il n'est pas possible de simplement équilibrer les pressions lors de la rencontre. Il va falloir construire un module intermédiaire, une sorte de sas, dont la composition de l'atmosphère et la pression seront d'abord équilibrées avec la pression du module sortant, puis ceci fait il faudra fermer l'écoutille du module sortant, équilibrer les pressions avec le module entrant, en faisant en sorte que jamais toutes les écoutilles ne soient ouvertes en même temps. On le voit, l'opération n'est pas la plus simple, mais elle fonctionne.


Les équipages sont désigné : 3 astronautes 🇺🇸 : Thomas Stafford, Vance Brand et Donald Slayton et 2 cosmonautes 🇷🇺 : Alexeï Leonov et Valeri Koubassov, la capsule Soyuz ne pouvant accueillir que 2 personnes en combinaison intra-véhiculaire.



A partir de 1973, les équipages Américains se rendent en Russie : Moscou, Baïkonour, puis c'est au tour des Russes de venir aux USA : New-York, Houston, Cap Canaveral. C'est un choc culturel pour chacun d'entre-eux. Les Américains sont surpris de voir les rues désertes, les véhicules d'un autre âge et souvent en piteux état, et les Russes sont choqués par la vie trépidante, la hauteur des building et le luxe tapageur des voitures.

Une méfiance réciproque s'installe, chacun ayant la sensation d'être épié par les services secrets de l'autre. Mais en se côtoyant, les équipages se rapprochent. Reste la barrière de la langue. Symboliquement, il est décidé que les astronautes (US donc) parleraient en Russe, et les cosmonautes (Russes) parleraient Anglais. Les inévitables erreurs de traduction des uns et des autres déclenchent des fous rires et achèvent de briser la glace.


Le 15 Juillet 1975, l'évènement est couvert par une retransmission télévisée mondiale. L'équipage soviétique s'élance de Baïkonour à bord du vaisseau Soyouz 19 à 12H20, et se place sur une orbite de 225 km. 07H30 plus tard c'est au tour de l'équipage US de s'élancer depuis Cap Canaveral à bord du module de commande 111 (qui aurait du orbiter autour de la lune lors de la mission Apollo 15) de rejoindre une orbite un peu plus basse que celle des Russes.

Pendant 2 jours, après une série de manœuvres nécessaires à synchroniser l'orbite et les vitesses, les deux vaisseaux sont enfin amarrés.



L'écoutille s'ouvre le 17 Juillet à 19H20, dévoilant aux téléspectateurs du monde entier une scène qui entrera dans l'histoire : une poignée de main entre Thomas Stafford et Alexeï Leonov, à la verticale de la ville de Metz. Chacun des deux présidents, Russe puis Américain y va de son petit discours sur la paix, la fraternité, la coopération...

Le lendemain, c'est au tour des Soviétiques d'entrer dans le module Apollo.

Le 19 Juillet, les deux vaisseaux se séparent, et volent en formation à quelques mètres l'un de l'autre au dessus de la terre tout en effectuant quelques expériences de spectroscopie.


Le 20 Juillet, chacun des 2 vaisseaux se prépare à effectuer sa propre rentrée atmosphérique. Ce sont les Russes qui les premiers, le 21, font leur retour sur terre dans les steppes du Kazakhstan, pendant que les Américains mènent d'autres expériences avant d’amerrir le 24.


Les mois suivants, les deux équipages effectuent une tournée commune, à la fois aux États Unis et en URSS. L'équipage US reçoit un accueil chaleureux en Russie et vice versa.


Aujourd'hui, vous pouvez voir une reproduction fidèle à l'échelle 1 de l'ensemble des modules Apollo-Soyouz au National Air & Space Muséum de Washington.


Enfin, la véritable capsule Soyouz ayant effectuée la mission est exposée au Sergeï Korolev Rocket and Space Corporation Muséum dans la banlieue de Moscou.


Après cette mission, plus aucune capsule Apollo ne volera dans l'espace. Une aire nouvelle s'ouvre avec les navettes spatiales et la coopération Russo-Américaine ira en s'intensifiant, d'abord avec la station Mir (sur laquelle s'amarrera la navette Américaine) puis deviendra véritablement internationale plus récemment avec la Station Spatiale Internationale.


Malheureusement, l'histoire nous montre que la paix est fragile : les vieilles tensions que l'on croyait à jamais oubliées sont réapparues depuis l'invasion de l'Ukraine par Moscou. La belle harmonie semble faire partie du passé. En 2022, Dimitri Rogozine, patron de Roscosmos (la NASA Russe) n'a pas hésité à prononcer des menaces directes, mettant l'intégrité de l'ISS en péril. Toute coopération avec les Russes est rompue, les clients qui avaient signé des lancements avec Soyouz en sont pour leurs frais, obligés de négocier de nouveaux contrats, allongeant les délais de lancement. Je pense notamment à OneWeb qui comptait sur Soyouz pour placer sa constellation de satellites en orbite et qui a du se rabattre sur SpaceX, son concurrent direct !

Espérons au moins que cette situation puisse apporter des clients à Ariane Espace !



Michel Havez, Juillet 2022.


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