En 1859, les réseaux électriques et télégraphiques subissent d'importantes pannes qui prennent tout le monde par surprise. C'est l'évènement de Carrington.
Le 23 Mai 1967, les radars du Ballistic Missile Early Warning System du département de la défense Américaine sont sérieusement perturbés. Ces interférences sont initialement interprétées comme un brouillage intentionnel de la part des soviétiques, acte considéré comme une déclaration de guerre. Des bombardiers nucléaire de contre-attaque Américains furent sur le point d'être déployés et de déclencher la troisième guerre mondiale.
Le 12 Mars 1989, des aurores polaires de forte intensité sont aperçues à des latitudes aussi méridionales que le Texas. Certains y voient un lien avec la mission de la navette spatiale STS-29, lancée le jour même. On est en pleine guerre froide, Russes et Américains se soupçonnent mutuellement, d'autant que les appareils radio travaillant sur des fréquences à ondes courtes sont eux aussi fortement perturbés. Des réseaux électriques au Québec sont impactés, avec des conséquences allant de fluctuations mineures à la défaillance de lignes entières, voire à la destruction de transformateurs.
Mais aucun des ces faits n'est l’œuvre d'une puissance politique. Que s'est-il alors passé ?
Notre étoile, le soleil, de par sa masse, fait fusionner les atomes d'hydrogène qui le composent. En fusionnant, ces atomes d'hydrogène produisent de l'hélium.
C'est ce qu'on appelle une réaction thermonucléaire. Cette réaction produit une grande quantité d'énergie, sous différentes formes et éjecte de la matière dans toutes les directions, sous la forme d'un rayonnement.
Dans ce rayonnement, on va trouver :
un puissant champ électro-magnétique,
des ultra-violets,
des infrarouges,
de l'énergie thermique (chaleur),
des photons (lumière),
des ondes radio,
des rayons cosmiques.
Le cœur du soleil bat selon un rythme de 11 ans (c'est une moyenne, la durée du cycle peut varier de 8 à 15 ans). L'amplitude des maxima peut varier du simple au triple.
Ce cycle de 11 ans est établi sur l'observation des taches solaires. Le nombre des taches varie de zéro (minimum d'activité) à plus de 100 (maximum d'activité).
A la surface du soleil se produisent éruptions solaires qui génèrent des protubérances.
Parfois, une protubérance ou une éruption est beaucoup plus forte que les autres et une bulle de plasma est éjectée de la couronne solaire. Ce phénomène est appelé une éjection de masse coronale (EMC). Ou CEM en Anglais. On mesure en moyenne une EMC par semaine lors des minimas solaires et 2 à 3 par jour lors des maxima. Ces EMC sont des phénomènes de très grande ampleur : les plus petites font une centaine de diamètre terrestre (celles-ci sont insignifiantes) mais elles peuvent atteindre plusieurs dizaines de rayons solaires. Elles se déplacent à très grande vitesse et parcourent la distance qui nous sépare du soleil en 3 jours. Heureusement pour nous, les EMC sont directives (comme un tir de fusil) et sont rarement dirigées vers la terre.
Quelles sont les conséquences ?
Lorsqu'elles sont dirigées vers la terre, les EMC génèrent un puissant champ magnétique, si puissant qu'il peut prendre l'ascendant sur le champ magnétique terrestre, provoquant des orages magnétiques de grande ampleur et des évènements tels que ceux cités en introduction de ce document.
Réseaux électriques, communication (filaire ou pas), navigation (maritime et aérienne), signaux GPS, tout ceci peut être impacté de légèrement à sévèrement, voire détruit.
Si elle se produisait de nos jours, une EMC de la puissance de l'évènement de Carrington (voir 1er paragraphe) nous ramènerait brutalement à l'âge de pierre, au moins pour plusieurs années. Il nous faudrait reconstruire tout ce qui fonctionne à l'électricité : les générateurs électriques, les outils électriques qui servent à fabriquer les générateurs avec lesquels ont pourra fabriquer des outils pour fabriquer des géné... Oh je sens que ça va être compliqué !
Dans l'espace, l'ISS est bien isolée des radiations normales, mais il ne faudrait pas que l'ISS se retrouve sur la trajectoire d'une EMC ! A mesure que l'exploration spatiale s'étendra vers une présence accrue sur la lune ou mars, la problématique de la météo solaire se posera encore plus certainement.
Alors si elles sont dangereuses, peut-on au moins les prévoir ? La réponse ne va pas vous plaire : le 7 décembre 2020, le NOAA (La National Oceanic and Atmospheric Administration : l'agence américaine responsable de l'étude de l'océan et de l'atmosphère) émet un avis de tempête géomagnétique de niveau G3, sur une échelle qui va de G1 à G5. Elle est finalement été rétrogradée au niveau G1 : le champ magnétique transporté par l'EMC pointait vers le nord au moment de sa rencontre avec celui de la Terre et s'est, contre toute attente, finalement trouvé dans l'incapacité de fissurer notre bouclier protecteur. La précision des prédictions demande donc à être encore améliorée.
Le cycle solaire n'a que très peu d'effet sur le climat (0,1% du rayonnement radiatif). J'en profite pour ajouter que la terre est à son aphélie (au plus loin du soleil) le 6 Juillet. La distance terre-soleil n'influe donc pas sur la température terrestre. C'est bien sûr l'inclinaison de la terre sur son axe de rotation (23,30° en moyenne) qui est responsable du cycle des saisons.
Pour finir sur une note positive : si elles peuvent se montrer destructrices, les EMC sont en effet à l'origine de l'un des spectacles de la nature les plus beaux qui soient : les aurores polaires. (1)
Lors de tempêtes géomagnétiques extrêmes, elles peuvent même apparaître à des latitudes bien plus basses qu'habituellement, donnant accès à la magie à beaucoup plus d'entre nous.
Sur ce timelapse que j'ai réalisé en Octobre 2024 sur les hauteurs de Saint Michel l'Observatoire, on distingue clairement l'évolution de l'aurore et même le déplacement des draperies :
La photo ci-dessous a été réalisée le 01 Janvier 2025 sur les hauteurs de Forcalquier dans le magnifique site des Mourres !
(1) On emploie souvent le terme aurore boréale pour désigner toutes les aurores polaires. Un aurore boréale se trouve dans l'hémisphère Nord,
et dans l'hémisphère Sud on parle d'aurore australe.
Il faut donc employer le terme aurores polaires lorsque l'on en parle au sens large.
Michel havez, 14 Juillet 2021.
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